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La musique est un art dominé par de grands monopoles imposant leur vision des choses. Ils participent à une organisation non-démocratique de la musique : la majorité des artistes est mise à l’écart par un système les dominant et ne rémunérant qu’une poignée d’entre eux lancés par une industrie de plus en plus frileuse. Mais même ceux qui arrivent à percer subissent les majors qui en position de force imposent des conditions leurs étant très favorables (partage inégal des marges sur les vente des CD, contrats d’exclusivité, etc.) et n’ayant pour objectif que la rentabilité. Ces entreprises cherchent aussi à contrôler Internet, mettant en danger la liberté d’expression.
La musique est devenue une industrie. Face à ce constat, la musique libre tente de rétablir un équilibre aussi bien en termes de partage de revenus que de diversité de la création. Elle s’inscrit en plein dans son époque : sans chercher à verrouiller son environnement, elle en tire parti.
Même si libre n’est pas synonyme de gratuit, la musique libre est une aubaine économique pour tous :
pour les mélomanes qui peuvent encourager et soutenir directement les artistes et la création, en ayant la certitude que la totalité (ou la grande majorité) des revenus vont aux artistes
pour les artistes, qui avec une proximité avec leurs publics, peuvent faire émerger de nouveaux modèles économiques plus respectueux d’eux-mêmes et de leur musique
pour les diffuseurs qui peuvent réaliser des économies, facilement utiliser de la musique et bénéficier d’une plus grande sécurité juridique
Une alternative à un système injuste
Un système dominant inéquitable et anti-démocratique
Nous assistons en France et dans le monde à un marché de la musique totalement injuste, qui ne rémunère qu’une poignée d’artistes et donc qui n’assure pas la diversité de cet art pourtant nécessaire à une culture commune. Le trio Majors-Sacem-Médias joue la même partition dans ce système, produisant, répartissant les revenus, et diffusant un tout petit nombre d’artistes. Ces trois acteurs sont tous responsables de la concentration abusive des revenus de la musique. Même la commission chargée de la surveillance des sociétés de perception et de répartition des droits d’auteur 1 montre que ce système ne défend ni les artistes ni les consommateurs, mais est au service de lui-même. En plus de leur logique de rentabilité poussée à l’extrême, les organismes impliqués prennent des marges démesurées au détriment des artistes. C’est donc des dizaines de milliers de musiciens qui souffrent d’une organisation verrouillée cherchant à conserver ses rentes.
Avec ce schéma 2 représentant la répartition des droits perçus par la Sacem 3, on peut se rendre compte à quel point les revenus issus de la musique sont inégalitaires, et c’est sans compter que beaucoup de musiciens n’y ont même pas accès 4. La grande majorité des sociétaires de la Sacem ne touche donc même pas un seul centime de la Sacem, tout en ayant payé les 121 euros de frais d’inscription 5.
Vous trouverez plus de détails sur l’état de la concentration du marché de la musique dans la partie « En savoir plus » 6.
On arrive donc à une situation anti-démocratique : la culture, c’est-à-dire ce que les citoyens ont en commun et donc ce qui fait société, est accaparée par un système défendant ses propres intérêts et entretenant une concentration du marché de la musique sur une poignée d’artistes. L’industrie du divertissement piétine donc un modèle de société démocratique et républicain.
Les majors du disque sont assez largement responsables de cette situation, à un double titre.
Au début des années 2000, elles ont délibérément concentré leurs moyens marketing sur un tout petit nombre de valeurs sûres. Entre 2001 et 2004, le nombre d’artistes sous contrat avec les quatre majors a énormément baissé. Des artistes rentables mais pas suffisamment, comme Jacques Higelin, Brigitte Fontaine ou Alain Chamfort, se sont vus remercier par leurs maisons de disques, qui ont pratiquement cessé en parallèle de recruter de nouveaux talents. Résultat, en 2006, moins de 6 % des références vendues accaparaient 90 % du marché. Les radios ont aussi contribué à appauvrir le marché. Que Choisir
Concernant la radio, voici quelques chiffres issus de l’observatoire de la musique. En 2011, sur un panel de 31 radios, on assiste a une très forte concentration : 1 533 titres (1,9 % des titres diffusés) ont été diffusés plus de 400 fois (+4,1 % vs. 2010) pour un nombre de diffusions de 2 427 643 soit 73,9 % de parts en diffusions (+0,9 pt vs. 2010). 26 titres ont été diffusés plus de 10 000 fois. Sur les 31 radios en tout, seulement 23 818 artistes différents ont été diffusés. 7
La responsabilité porte donc à la fois sur les majors, les médias, mais aussi sur les sociétés de perception et de répartition des droits d’auteur qui utilisent des méthodes de répartition renforçant la concentration.
La Sacem n’échappe pas à la règle, et s’en vante même. Bernard Miyet, son ancien président, déclarait que « La Sacem est une société privée (…) Elle n’a jamais eu de mission de service public, elle ne bénéficie d’aucune aide de l’État » 8. La Sacem est fidèle à une logique de marché où la rentabilité est le maître mot, plutôt que de défendre réellement les artistes. La valorisation réalisée par la Sacem est essentiellement économique, et c’est pourquoi elle obéit plus à une politique quantitative que qualitative, comme le dénoncent d’anciens employés 9. Pour le détails des inégalités de répartition de la Sacem, nous vous conseillons de consultez cet article de Désert Culturel et celui-ci de numerama. Amendons le propos lié au schéma précédant représentant le partage des revenus perçus par la Sacem : la Sacem n’est pas entièrement responsable des inégalités de répartition des revenus qu’elle collecte. En effet, elle est censée les répartir proportionnellement à la diffusion des musiciens. Cependant, la collecte des données des titres diffusés est biaisée. La Sacem ne connaît exactement qu’une petite partie des morceaux diffusés, le reste étant estimé par relevés sur place. Sauf que la proportion de ces sondages réalisés par la Sacem est l’une des plus faibles des sociétés de perception et répartition, favorisant exagérément les artistes les plus populaires. La diversité culturelle musicale est donc mise en difficulté par tous les organismes impliqués dans ce marché.
Par ailleurs, la Sacem a tendance à abuser de son statut de monopole (privé) et à profiter du système. Scandales de l’excessive rémunération de son président et des cadres, frais de fonctionnement importants par rapport aux sommes brassées, faible investissement dans la diversité, la Sacem cumule les faits qui lui valent une mauvaise réputation. Premièrement, ses frais sont très importants au regard des sommes qu’elle peut brasser, et les 15 % annoncés 10 minimisent les frais totaux des autres sociétés de perception et de répartition. En effet, les différents organismes impliqués se transfèrent mutuellement des sommes importantes, sans oublier à chaque fois d’en déduire les frais de fonctionnement 11.
Deuxièmement, elle n’a pas établi de règles de déontologie basique, par exemple sur le fait qu’un de ses administrateurs ne puisse pas examiner sa propre demande d’aide ou de subvention 12. Troisièmement, dans les questions de rémunération et de salaires, plusieurs scandales ont déjà éclaté. Vous trouverez des détails dans les articles sur Le point, ici et là, et ailleurs ici et là. Enfin, la Sacem est fière d’annoncer qu’elle subventionne les artistes via des soutiens à la diversité (ce qui est une obligation légale), mais on ne peut que déplorer la faiblesse des montants par rapport à la masse d’argent qu’elle peut brasser. Les 5 % de l’argent perçu qu’elle reverse dans des projets promouvant la diversité sont à comparer avec ses 15 % 13 de frais de fonctionnement… Regardez cette interview pour en savoir plus.
Les CD et DVD sont-ils la principale source de revenus des artistes ?
Non. Les ventes de disques au sens large assurent seulement une petite part de leurs revenus. En 2007, elles représentaient 16,5 % des sommes collectées par la Sacem. Les artistes gagnent en fait plus d’argent sur les concerts et les diffusions à la radio, à la télé ou en boîtes de nuit. Ce qui relativise sérieusement la portée économique du piratage. (…) Seuls 5 % des artistes gagneraient de l’argent grâce aux ventes de disques. Le problème des 95 % restants est de se faire connaître, pas d’éviter de se faire pirater. Que Choisir
En ce qui concerne la musique enregistrée, l’écart-type en matière de ventes est extrêmement élevé. Ainsi, sur le marché français du disque 2004, les 10 albums les plus vendus représentent un cinquième des volumes (21 %), les tops 100 en représentant les trois quarts à eux seuls. Cette concentration explique qu’environ 20 % seulement des albums dégagent des bénéfices, selon les sources professionnelles spécialistes du secteur, et permet de comprendre pourquoi peu d’artistes-interprètes touchent des royalties proportionnelles aux ventes. Économies des droits d’auteur14
La spoliation des artistes « rentables »
Mais les « petits » artistes ne sont pas les seuls à souffrir. Même si la très large majorité des revenus est accaparée par une poignée de musiciens, ces derniers ne sont pas non plus dans une situation juste. Les maisons de disques tirent des marges très importantes des ventes (physiques et numériques) au détriment des musiciens.
On peut le constater sur les graphiques suivants qui montrent le partage des revenus.
On voit donc que le rapport entre les majors et les musiciens est inégal, même si ces derniers sont connus. Et encore, ces chiffres ne prennent pas en compte d’autres techniques permettant d’emprisonner les artistes, comme les contrats d’exclusivité.
Sur le schéma ci-dessous 15 les cercles et chiffres en rose représentent ce que doit vendre un musicien pour toucher le salaire minimum américain (1 160 $) en fonction de la méthode de diffusion (CD pressé soi-même, ou avec les majors, ventes sur iTunes, écoutes en streaming, etc.). Dans la colonne de droite, le nombre en gris représente le prix que touche la major sur une vente, et en rose ce que touche l’artiste.
On comprend dès lors bien l’intérêt qu’un artiste peut avoir à faire ses propres CD, et de se diffuser soi-même.
Peut-on pour autant parler de spoliation ? S’il est vrai que les majors ont des coûts à assumer (choix et découverte des artistes, enregistrements en studio, pressage et distribution, promotion publicitaire, etc.), deux effets font que ces frais diminuent et que leurs marges augmentent. Premièrement, en amont les maisons de disques ont presqu’arrêté de recruter et de lancer de nouveaux artistes. Ces frais qui pouvaient être importants diminuent drastiquement. Cette industrie n’assure donc pas son rôle premier : apporter une valeur ajoutée par la sélection des artistes. Se concentrant sur une rentabilité poussée à l’extrême, elle diminue ses coûts, tout en cherchant à en augmenter les recettes. Deuxièmement, les évolutions récentes des ventes de musique sont très largement favorables aux majors : on assiste à un déplacement des supports de musique, du CD vers des fichiers numériques. Ce passage progressif au numérique est une très bonne aubaine pour les majors, pas pour les artistes. Les maisons de disques peuvent diminuer drastiquement leurs coûts de diffusion, devenant pratiquement nuls (pas de pressage de CD, de transport, de marges du magasin), sans baisser le prix de vente, mais sans augmenter le pourcentage reversé aux musiciens !
Bref, les coûts des maisons de disques diminuent, leurs marges augmentent, et elles reversent de moins en moins aux artistes. Leur crise est loin d’être aussi catastrophique qu’elles veulent le faire croire, mais on voit aussi que certains artistes même s’ils arrivent à percer sont loin d’être bien traité par le système actuel. C’est pourquoi la musique libre peut être une solution leur permettant de reprendre le contrôle sur leur diffusion.
Ci-dessous vous trouverez diverses sources décrivant le fait que les artistes ne touchent qu’une petite partie des revenus issus de leur travail.
Qui est le principal perdant dans la baisse des ventes de disques ?
Les maisons de disques : Universal (25 % du marché), Sony BMG (21 %), EMI (13 %) et Warner (11 %). Ce sont elles qui encaissent l’essentiel du produit des ventes. Sur les 15 ou 20 euros que coûte un CD, en effet, 19,6 % va à l’État, sous forme de TVA, 21 % au distributeur, 50 % à la maison de disques. L’artiste principal, les auteurs et les compositeurs se partagent environ 9 % du prix de vente. Officiellement ! Car en réalité, les maisons de disques soustraient parfois de ces royalties le coût d’enregistrement de l’album, de la promotion et de la réalisation des vidéoclips. Que choisir
Nous vous invitons à lire la partie 1.3 du livre libre Un monde sans copyright… et sans monopole, intitulée « Le droit d’auteur est-il réellement une incitation ? ».
On peut notamment y lire que « Martin Kretschmer et Friedemann Kawohl ont observé que de tels marchés où le gagnant rafle tout sont la norme dans la plupart des industries culturelles. (…) Même le très officiel rapport du British Gowers sur les droits de propriété intellectuelle est contraint de concéder qu’ »en moyenne, les musiciens perçoivent un très faible pourcentage des royalties issues de leurs enregistrements » » 16. « Dans la plus grande partie du monde, peu de redevances sont conservées localement, ce qui implique qu’elles ne peuvent être une source de revenus significative pour les artistes qui y vivent et y travaillent ».
Quant à l’industrie des concerts, les données collectées par Pollstar Magazine montrent qu’aux Etats-Unis, le chiffre d’affaires réalisé sur scène par les artistes a crû de 65 % entre 2000 et 2004, et le nombre de billets vendus de 28 %, tandis que chutaient les ventes de CD. Des données françaises confirment cette tendance : sur la période 2000-2003, le marché des « tournées professionnelles de variété » a progressé en valeur de 70 %.
Aujourd’hui, les majors ne profitent guère de cette manne. Si les contrats standards attribuent aux labels la gestion et la quasi-totalité des profits des ventes de CD ainsi que, le plus souvent, le merchandising hors concerts (tee-shirts, etc.), ils laissent aux artistes la gestion et les profits des concerts et des produits dérivés vendus à cette occasion. Ainsi, selon des statistiques américaines, plus de 90 % des artistes ne vivent que des revenus tirés de leurs performances sur scène : un artiste peut escompter toucher jusqu’à 35 % des recettes engrangées par ses concerts et 50 % des produits dérivés associés. Rompre avec cette logique et intégrer les revenus des marchés induits de la musique dans le giron des firmes musicales représente pour celles-ci un levier stratégique, propre à contrer la récession des ventes de CD. Libération
À l’heure actuelle, pour la musique en ligne, et si la maison de disques possède sa plate-forme, l’artiste-interprète perçoit environ 0,04 € du prix TTC du morceau vendu, soit un taux de royalties tournant autour de 5,7 \ % du PGHT (Prix de Gros Hors Taxe). Pour une sonnerie de téléphone portable téléchargée pour la somme de 3 €, l’artiste recevra aux environs de 0,11 €, soit environ 14,4 \ % du PGHT. Ce taux est très variable et dépend du statut du musicien ainsi que du contrat signé avec le producteur. En tout état de cause se posent tout à la fois les questions de la faiblesse des rémunérations pour la majorité des artistes, de la transparence des informations et des coûts transactionnels associés. Économies des droits d’auteur17
L’accord Creative Commons-Sacem, un danger pour la musique libre ?
Un accord entre la Sacem et Creative Commons a été signé. Il permet aux sociétaires de la Sacem de mettre certains de leurs morceaux sous 3 licences Creative Commons : BY-NC, BY-NC-SA et BY-NC-ND. Toutes trois contiennent la clause « Pas d’utilisation commerciale ». Il s’agit encore d’un projet pilote qui pourra être ou non renouvelé en fonction de sa réussite et qui durera du 1er janvier 2012 au 30 juin 2013.
Si cet accord témoigne d’un début d’ouverture de la part de la Sacem, il pose de nombreux problèmes à la musique libre qui ont deux causes principales :
La Sacem n’accepte que du NC : il ne s’agit pas là d’une véritable politique d’ouverture de sa part. On ne peut que déplorer le refus des licences vraiment libres, mais ce point montre bien que la Sacem ne change pas sa politique et reste trop axée sur une vision économique, au lieu de défendre les artistes et l’art.
La Sacem réinterprète la non-commercialité de manière beaucoup trop restrictive. C’est de là que vient le véritable danger : de nombreuses utilisations que l’on considérait avant comme non-commerciales vont entrer sous l’égide de la Sacem. Certaines structures associatives, des particuliers, et d’autres organisations dépendront donc totalement du bon-vouloir de la Sacem.
Précisons que ces problèmes ne touchent que le petit nombre d’artistes sociétaires de la Saem et ayant souscrit à cet accord, et non tous les artistes diffusant sous Creative Commons.
Info
Cet accord représente-t-il un risque pour la musique libre ?
C’est bien un danger pour la musique libre, puisque cet accord transpose la politique ancestrale de la Sacem avec des licences de libre diffusion, deux visions s’opposant frontalement. Si la Sacem ne change pas sa position de monopole et son point de vue en complet décalage avec les nouvelles pratiques liées aux technologies récentes, il n’y aura pas d’avancée possible. Il faut cependant souligner que c’est aussi un premier pas, même s’il risque fort d’aboutir à un échec.
Sur le deuxième point problématique, il existe une grande « zone grise », c’est-à-dire un certain nombre de cas qui en théorie sont commerciaux, mais dont on ne sait pas si en pratique il faudra payer une autorisation à la Sacem. En effet, la définition de la notion commerciale publiée par la Sacem et Creative Commons sur la FAQ dédiée est très large.
Important
Si vous êtes dans un des cas suivants, vous entrez dans le cadre commercial selon la Sacem. Vous comprendrez que beaucoup d’utilisations considérées précédemment comme non-commerciales, le deviennent selon la Sacem. Rappelons que cet accord ne concerne qu’un petit nombre d’artistes (ceux ayant souscrit à cet accord avec la Sacem) et non tous les artistes sous licence Creative Commons.
Pour la Sacem est commercial :
toute utilisation de l’œuvre par une entité à but lucratif ;
toute utilisation de l’œuvre donnant lieu à une contrepartie, financière ou autre, sous quelque forme, à quelque titre et pour quelque motif que ce soit et quel qu’en soit le bénéficiaire ;
toute utilisation de l’œuvre à des fins de promotion, ou en lien avec la promotion, d’un quelconque produit ou service et quel qu’en soit le bénéficiaire ;
toute utilisation de l’œuvre par un organisme de télédiffusion ou sur les lieux de travail, dans les grands magasins ou les commerces de détail ;
toute utilisation de l’œuvre dans un restaurant, un bar, un café, une salle de concert ou autre lieu d’accueil du public ;
toute utilisation de l’œuvre par une entité dans le cadre, ou en relation avec, d’activités générant des recettes ;
tout échange en ligne ou autrement d’une œuvre contre une autre œuvre protégée par un droit de propriété intellectuelle mais seulement lorsque sont générées des recettes de publicité ou de parrainage, directes ou indirectes, ou qu’intervient un paiement de quelque nature que ce soit. 18
Si vous souhaitez diffuser un artiste bénéficiant de cet accord (c’est-à-dire qui est à la
Sacem et qui diffuse sous licence CC-BY-NC, CC-BY-NC-SA, ou CC-BY-NC-ND), alors vous devez absolument contacter la Sacem avant la diffusion pour savoir si votre cas relève d’une utilisation commerciale, et donc si vous devez payer une autorisation. De plus, si vous diffusez une seule musique bénéficiant de cet accord, vous devrez payer pour l’ensemble de votre événement.
Vous comprenez donc que pour, par exemple, de petites structures n’ayant pas de fonds propres mais organisant un événement, cet accord est un danger pouvant les mettre en grande difficulté.
Si vous êtes musicien et que vous hésitez à bénéficier de cet accord, il faut savoir qu’aucune politique d’incitation n’a été mise en place (par la Sacem ou Creative Commons) et donc que vous ne bénéficierez pas d’un accompagnement. Par ailleurs, vous devrez aussi renoncer à toute diffusion sur des plateformes en ligne de musique (Jamendo, magnatude, etc.), puisqu’elles relèvent de l’utilisation commerciale. Sans oublier les publicités sur votre site Internet personnel de votre groupe, car d’après la Sacem « L’utilisation d’une œuvre musicale par un site Internet sur lequel figurent des bandeaux publicitaires doit être considérée comme commerciale, que ces bandeaux génèrent des revenus ou qu’ils contribuent simplement à couvrir les frais ». Vous devez être aussi conscient que bénéficier de cet accord risque de réduire la diffusion de vos œuvres, et de créer des problèmes aux organisations vous diffusant.
Cependant, cet accord offre quand même certaines possibilités. Il permet de pouvoir bénéficier des avantages de la gestion collective (la protection puisque l’union fait la force) surtout si vos œuvres sont diffuser à grande échelle, mais oblige aussi à en supporter les inconvénients 19 (la valorisation par les sociétés de gestion des droits d’auteur est principalement économique).
Pour aller plus loin, nous vous conseillons ces quelques articles : une excellente analyse sur Libre Accès, le communiqué du collectif sound records, l’analyse par Aisyk de l’interprétation de la clause NC par la Sacem, et éventuellement si vous vous sentez l’âme militante la pétition contre cet accord.
La musique libre en phase avec son époque
À l’inverse de ces industries du divertissements vieillissantes qui voient leur ancien modèle économique s’effondrer, la musique libre innove et prospère avec les innovations technologiques récentes.
En effet, le vieux modèle économique de rente dont bénéficiaient les majors s’effrite au fur et à mesure, et ce pour plusieurs raisons. Les industries du divertissement ont du mal à accepter leur changement de position : grâce à Internet notamment, on a de plus en plus tendance à passer d’un réseau de distribution de la musique centralisé à un réseau décentralisé, où ces entreprises ne sont plus le centre vital. Elles passent donc d’une situation de monopoles incontestés, indispensables, et sans alternatives, à une situation où une concurrence commence à émerger via des réseaux parallèles.
Face à ce constat les lobbies font pression sur les divers gouvernements pour faire passer des lois permettant de verrouiller Internet, sous divers motifs (le téléchargement illégal notamment). Des pouvoirs politiques qui sont dans la même situation : ils ont globalement tendance à avoir peur de ces nouveaux médias décentralisés sur lesquels ils ne peuvent avoir la main mise (contrairement aux médias classiques qui sont beaucoup plus faciles à contrôler). Ces lois sont nombreuses (Dadvsi, Hadopi, Acta, Pipa, Sopa, etc.). Heureusement toutes ne passent pas, mais chacune d’entre elles menace l’éco-système qu’est Internet 20 et donc nos libertés les plus fondamentales, comme la liberté d’expression.
Alors qu’en vérité le problème de ces industries n’est pas inhérent à ces innovations technologiques récentes, mais est bien plus la résurgence d’un problème interne. Elles n’ont pas su changer et adapter leur modèle économique au virage du numérique. Mais reporter la faute sur Internet est malhonnête. On parle, par exemple, beaucoup dans les médias de « la crise du disque ». La baisse de la vente des CD est bien réelle évidemment, mais la cause n’est pas le téléchargement illégal comme ils aimeraient nous le faire croire. C’est bien plus une crise interne : le CD est un support vieillissant, qui a de moins en moins d’attrait par rapport au numérique. On connaît tous la facilité d’avoir des fichiers audio par rapport aux encombrants CD, surtout en déplacement : sur une seule clé USB, l’équivalent de centaines de CD. En restant focalisé sur la crise du CD, l’industrie du divertissement n’a pas cherché à innover afin d’utiliser toutes les potentialités d’Internet. De plus, les grands disquaires (Fnac, Virgin, etc.) ont fait un choix délibéré de réduire considérablement leur diversité de CD, diminuant ainsi d’autant plus l’intérêt d’acheter un disque 21. Ils ont fait des erreurs stratégiques, à eux d’en assumer les conséquences. 22
De plus, quand les industries du divertissement ont voulu « passer au numérique », elles l’ont très mal fait en voulant transposer leur ancien modèle sur ce nouveau monde « virtuel ». Ce qui a créé de très mauvaises expériences des clients. Les DRM, par exemple, sont des verrous artificiels qui vous empêchent d’utiliser votre musique comme vous le voulez (beaucoup se sont retrouvés ainsi à avoir acheté légalement des albums qu’ils ne peuvent pas écouter). La pauvreté de l’offre légale que proposent ces entreprises est à déplorer, surtout pour certains styles de musique, ou pour des groupes qui ne sont plus sur le devant de la scène. Le développement du partage illégal par Internet n’a donc rien d’étonnant.
C’est là que la musique libre entre en scène en apportant une solution. Si on adopte un point de vue opposé à celui que les industries nous martèlent, ces innovations technologiques deviennent non pas un frein à la création, mais une énorme opportunité, comme il n’en a jamais existé. Au lieu de vouloir revenir en arrière, la musique libre est totalement en phase avec son époque, et exploite ses nouvelles possibilités. Internet est un formidable outil démocratique pour se faire connaître, rencontrer son public, ou simplement partager sa passion : il permet à tous d’avoir les mêmes chances. La musique libre en autorisant légalement son partage permet d’utiliser au mieux ce potentiel : ouverture à un public international, visibilité, relation directe avec le public, retour et conseils sur ces créations, etc. Internet est un moyen de diffusion puissant à moindre coût. La musique libre devient de plus en plus populaire dans un contexte où il y a une véritable demande de plus de démocratie et d’accessibilité de la part d’un public mélomane et musiciens accablé et verrouillé par des industries vieillissantes. De plus, même si la musique libre s’inspire de ce qui se faisait avant le développement maladif du droit d’auteur, elle est une résurgence de la société moderne, par exemple dans l’effacement de la barrière entre l’amateur et le professionnel 23. Bref la musique libre est en accord avec son époque aux niveaux sociétal et technologique, en exploitant de nouvelles manières de créer et de partager.
Ce schéma a été réalisé par Framartin pour Framasoft, il est mis à disposition sous Creative Commons BY 3.0. Le logo de l’homme a été réalisé par The Noun Project sous licence CC-by 3.0 et le logo du sac de billet a été réalisé par Luis Prado sous la même licence. Le logo des billets de banque réalisé par Nick Levesque est sous licence CC-0. Les chiffres ont été calculés par le très bon blog Désert Culturel. ↩
Pour « Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique » est la principale société de gestion des droits d’auteur. ↩
« Bien qu’elle promeuve en quelque sorte de jeunes artistes par subventions au sein de sa division culturelle cela reste marginal par rapport au potentiel d’artistes jamais diffusés et qui n’ont donc pas accès à la Sacem puisque ne représentant pas un montant de droits suffisant pour y être inscrit et défendu. » Extrait d’une interview d’un ancien employé de la Sacem↩
Ce schéma a été réalisé par Framartin pour Framasoft, il est mis à disposition sous Creative Commons BY 3.0. Le logo de la radio a été réalisé par Monika Ciapala sous licence CC-by 3.0. La statistique vient du rapport annuel 2011 sur la radio de l’observatoire de la musique. ↩
Source : Rapport annuel de la Cité de la musique de l’observatoire de la musique. ↩
Article de recherche de Françoise Benhamou et de Dominique Sagot-Duvauroux ↩
Ce schéma réalisé par David McCandless du blog Information Is Beautiful est sous licence CC-by-nc. Il faut noter que toutes les informations ne sont pas fiables à 100 % du fait de l’opacité (et on comprend bien pourquoi…) qu’entretiennent les majors sur ces questions de partage des revenus, et des variations qui existent entre les contrats (certains artistes étant en position de force, ils peuvent négocier un meilleur contrat). ↩
Première citation : The History and Philosophy of Copyright, 2004, p.44 ; deuxième citation : Gowers, Gowers Review of Intellectual Property, 2006, p. 51. ↩
Article de recherche de Françoise Benhamou et de Dominique Sagot-Duvauroux ↩
On parle ici de « vrai Internet » décentralisé, où il n’y a en théorie pas de différenciation entre client et serveur. Pas de « Minitel 2.0 », de Facebook, ou d’entreprise quelconque cherchant à créer un internet fermé dans Internet. Écoutez l’excellente conférence de Benjamin Bayard sur ce point. ↩
Comme l’analyse cet article de recherche de Marc Bourreau, c’était tuer ce qui est rentable : « L’expression long tail vient d’un article de Chris Anderson dans la revue Wired (octobre 2004). Prenant l’exemple des avis et des critiques sur Amazon, l’auteur faisait remarquer que les sites commerciaux sur internet, parce qu’ils offrent une diversité bien plus grande que les boutiques physiques, font l’essentiel de leur chiffre d’affaires sur des articles peu vendus et non, comme il était classique, sur les best-sellers (la décroissance des ventes avec le rang est en loi puissance plutôt qu’exponentielle). » ↩
La disparition progressive de cette barrière est en effet une évolution sociale comme l’analyse Patrice Flichy dans Le sacre de l’amateur : Sociologie des passions ordinaires à l’ère numérique (La république des idées, Seuil). ↩